mardi 22 septembre 2009

Les dérapages incontrôlés de Renault



O
n ne rit plus. Le grand constructeur des voitures à vivre patine dans ses contradictions. Le créateur de la Dauphine, de la 4L ou de la R12, de l'Espace ou de l'Avantime, le vainqueur des 24 Heures du Mans ou du Rallye de Monte-Carlo, le fleuron de l'industrie automobile française, ennuie avec ses postures prétentieuses et d'un autre temps.

D'abord, sa dernière campagne de publicité me laisse, et je ne suis pas le seul, un goût désagréable. Comment peut-on faire valoir les mérites d'une gamme en prenant des enfants comme vecteurs ? L'envahissement agressif des panneaux publicitaires par des marmots affublés de prénoms idiots (vous en connaissez des bébé baptisé Laguna ou Modus ?...) constitue une assimilation indécente d'un objet et d'une personne, enfant qui plus est. Il fut un temps où l'utilisation de l'image d'un enfant comme prescripteur d'un produit dans la publicité était interdite par la loi. Il semble que cette disposition ne soit plus en vigueur, ou simplement plus adaptée. Les agences s'engouffrent dans une brèche en ignorant avec soin des règles de comportement, banalisant l'être humain au point d'en faire aussi un produit. En tout cas, quel est le budget d'une telle campagne ? Cette manne ne peut-elle être affectée à d'autres domaines, renforçant la recherche vers des véhicules plus conformes à notre mode de vie ? A quoi peuvent servir la vitesse et les performances dans une société qui prend conscience de son environnement et qui colle l'étiquette "développement durable" sur toute démarche écologique ?

Ensuite, on apprend que l'écurie de Formule 1 que finance Renault et qui porte son nom, est soupçonnée de tricherie. Elle reconnaît même les faits. C'est beau cette honnêteté... La tricherie est en l'occurence troublante et soulève des questions gênantes. Rappel des faits.

Lors du Grand Prix de Singapour, l'année dernière, se produit un accident. Un des pilotes de Renault, qui aligne comme les autres deux voitures par course, sort mal d'un virage et percute le mur. Pas de bobo, mais la voiture est proprement détruite. Le jeune pilote est indemne, mais dans ce circuit tracé en ville, les accès pour dégager l'épave collée contre un muret sont moins nombreux que sur une piste étudiée à cet effet. De plus aucune grue ne se trouve dans ce virage. La course est neutralisée par un procédé où une voiture de la direction de course mène les bolides à vitesse réduite, avec interdiction de dépasser, pendant que les services de piste font leur office. Durant cette prériode, l'autre pilote de Renault, qui nageait dans les derniers, se retrouve en tête, bénéficiant des arrêts au stands de ses concurrents. Il finit par gagner la course. Bon et alors ?

C'est là que cet incident banal prend toute sa saveur. Ce Grand Prix avait lieu de nuit, à l'américaine, dans un pays où le pouvoir d'achat est étoffé. Pour un constructeur impliqué à ce niveau de compétition, la victoire est primordiale dans ces contrées lointaines où la valeur du sport possède encore un impact sur le public. Ensuite, l'accident lui-même est un exemple de maîtrise du pilotage : une sortie de virage où l'arrière se dérobe parce qu'on accélère trop tôt, une pirouette parfaite pour taper le mur bien parallèle, sans angle dangereux pour le pilote, dans un virage où les moyens de levage pour évacuer l'auto sont lointains, tout est rassemblé pour susciter les interrogations. Le calcul réside dans l'intervention de la voiture de sécurité car en ce cas, bon nombre de concurrents en profitent pour ravitailler, comptant sur leur performance pour récupérer leur place initiale. Cerise sur le gâteau, le pilote incriminé se fait renvoyer cette année, en cours de saison, pour manque de résultat. Quelle ingratitude ! Lui qui a permis la victoire de son coéquipier se fait remercier comme un vendeur de concession... Alors il balance.

Mais à qui profite le crime ? Pas forcément à l'écurie qui montre un mauvais pilote se faisant piéger comme un débutant dans un virage simple. Le patron opérationnel de l'écurie avait besoin de résultat, ce fameux Flavio Briatore, ancien bras droit de Benetton, le roi du textile italien. Il en tire certainement un profit incontestable. Le hic, c'est que le pilote était son poulain, une de ses découvertes. Comme l'était Michaël Schumacher, qui a gagné tant de courses et tant de championnats... Alors du coup, nous somme tentés de nous demander comment Schumi a remporté ses courses, avec l'aide de quel stratagème odieusement fomenté par son coach vulgaire et prétentieux il a pu régner en maître sur une discipline sans merci... Nous soulevons la question, sans vraiment vouloir connaître la réponse. Mais Briatore viré, banni, honni, pourrait bien chercher vengeance dans la révélation de combines saumâtres...

J'ai été un grand fan de Formule 1. J'ai même rêvé d'y travailler, d'y trouver le plaisir d'évoluer dans un milieu attirant. C'est dire si je ne veux pas briser l'image ni le rêve d'une jeunesse idéaliste. Mais cette époque est révolue. Messieurs les dirigeants de Renault, n'est-il pas temps de se retirer de la F1, et de consacrer les masses pécuniaires qui y sont injectées par votre écurie salie par un maquignon à d'autres efforts technologiques ? Ne devriez-vous pas vous interroger sur le bien-fondé d'une discipline sportive qui va à l'encontre des tendances actuelles ?

J'ai bien une réponse, mais je ne suis pas le patron de Renault...



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